« Oh la la, les roues ! » et parenthèse mécanique

Météo capricieuse et imprévus : nous avons loupé notre sortie avec mes élèves et Marie-Louise le 14 octobre (seul jour de la semaine où il a plu …) et notre rendez-vous tandem en forêt de Buzet.
Rendez-vous donc aujourd’hui avec Bruno, Jennyfer et Vivian. Pépin mécanique dès le départ : une des chaînes du tandem de Bruno a sauté, elle s’est coincée entre la manivelle et le cadre (petite parenthèse mécanique) et il nous est impossible de réparer. Je propose donc à Bruno de passer par la maison, nous réparerons avec l’outillage adéquat et nous roulerons autour de Garidech.
Réparation faite, boîtier de pédalier avant avancé pour tendre la chaîne qui relie les deux pédaliers et nous sommes prêts pour aller faire le tour du village par le chemin de randonnée et faire un petit détour par la « mythique » montée des Mortiers.

Jennyfer est toujours contente, le tandem la ravit, elle a toujours le sourire, je ne sais pas si elle est toujours comme ça au foyer mais sa bonne humeur est communicative.
Vivian, lui, est toujours aussi placide, poli, posé.

Suite de la parenthèse mécanique : sur un tandem, pilote et coéquipier sont « reliés » par une longue chaîne côté gauche (ils doivent donc pédaler ensemble ; il existe des systèmes avec une roue libre sur les pédaliers qui permet de les désynchroniser, chacun pédale à son propre rythme, je n’ai jamais essayé mais cela me semble poser quelques problèmes d’équilibre : les deux cyclistes ne lèvent pas la même jambe en même temps) et il y a à l’arrière un pédalier « classique » à droite relié par une chaîne au dérailleur arrière, toutes les commandes sont à l’avant (vitesse, freins) et seule bien sûr la roue avant est directrice (le guidon tourne). Imaginez un tandem articulé où chacun pourrait tourner son guidon …

Mais revenons à notre petite balade du jour.
Nous traversons le village pour nous diriger vers les hauteurs (nous partons de 150 m, les Mortiers « culminent » à 220 m), j’ai dit à Jennyfer et Vivian que nous allions faire la côte la plus dure du village et qu’il allait falloir appuyer. La première montée (goudronnée) se passe bien (on doit passer une première colline, descendre puis remonter sur les Mortiers). Nous attaquons le premier chemin, c’est gras … Nous nous y attendions un peu … Arrivent les Mortiers … Le terrain très gras aura raison de nous, Vivian et Bruno ont pratiquement réussi à monter la côte.
Petite pause en haut des Mortiers, la terre a tellement collé que nos roues ont doublé de volume, on se croirait sur des fatbikes, ces vélos à la mode avec des pneus énormes.
Nous repartons rejoindre le village et aller emprunter de randonnée d’En Balette. Je « lâche » un peu les freins dans la petite descente, Jennyfer est ravie, « c’est super le tandem ! ».
Nous revenons à la maison, Jennyfer et Vivian repartent avec Bruno.

Jennyfer n’aime pas la boue, moi non plus. Mais on s’y est collé (c’est vraiment le cas de le dire) sans problème. Il m’a fallu juste nettoyer complètement le vélo ensuite mais ce n’est pas gênant.

 

   

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Où est le handicap ? Cet après-midi, j’ai fait du tandem comme j’en fais avec mon fils ou avec un ami qui roule de temps en temps avec moi. Et vous venez de lire des lignes que n’importe quel cycliste aurait pu écrire dans n’importe quelle situation.
Oui, Jennyfer et Vivian vivent dans une structure spécialisée, ils en ont besoin, mais ils peuvent vivre des moments simples et « normaux ».
J’en ai parlé longuement avec mes élèves en classe lors de deux débats que nous avons menés sur le handicap et le vivre ensemble en septembre et ce lundi (avec pour point de départ des discussions les Jeux paralympiques et les itinéraires de Théo Curin et Philippe Croizon), tout est d’abord dans le regard que portent les valides sur les personnes en situation de handicap : beaucoup trop de gens ont encore un mouvement de recul devant une personne atteinte de trisomie, un tétraplégique, ou un regard plein de compassion, ce n’est pas forcément mieux. La personne vit ainsi, elle poursuit son chemin, ce chemin est parfois est plus dur à suivre, parfois l’aide est nécessaire, l’autonomie non acquise, etc. Mais ce ne doit pas changer notre regard ou notre discours. J’ai déjà dit à Vivian qui est aveugle « Tu as vu ? », bien sûr ensuite je décris ce que je vois pour partager avec lui, ce « Tu as vu ? » ne l’a pas gêné, il questionne lui-même, ça l’intéresse.
Et Jennyfer fait aussi son petit bonhomme de chemin …

Citations de Philippe Croizon, aventurier, nageur de l’extrême, issues du livre « Plus fort la vie » que nous avons lues et commentées en classe ce lundi avec mes élèves (merci à Noëlle, Professeur de philosophie, qui vient chaque année en classe animer une discussion sur le handicap et qui a choisi ces citations) :

« L’aide de l’autre m’est vitale et j’aime à la considérer comme un échange, un moment de partage. Pour les hommes, c‘est peut-être un peu plus compliqué car nous avons un sacré problème : l’orgueil ! »

« Mon handicap est spectaculaire. Pour qu’il s’estompe, je dois briser la glace. En racontant des blagues, en faisant le bouffon, cela devient possible. Concentrer tous les regards sur mon sourire. Mais l’humour à tout prix n’a pas de sens… Je contrôle sans cesse, dissimule pour leur laisser penser que je suis fort. »

« Les personnes avec un handicap corporel, mental ou psychique sont très souvent confrontées aux inégalités, à la discrimination, parfois même au mépris. »

« En traversant la Manche à la nage, je voulais démontrer que le handicap n’est pas une fatalité. Avec du courage et de la volonté chacun peut, qu’il soit valide ou non, repousser ses limites et accomplir de grandes choses. »

Deux autres que j’ai données à lire aussi aux élèves :

« Dans l’esprit du plus grand nombre, la personne handicapée est forcément en fauteuil roulant.  Mais il faut savoir que 80% des situations de handicap sont invisibles. »

« Il faudra certainement une génération, peut-être une de plus pour que changent les mentalités. J’ai malgré tout espoir que tout commence ici et maintenant ».

 

 

 

 

 

 

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