Le gribouillis sur la carte continue, tout Toulouse ou presque chapitre n+1 …
Un gros contraste aujourd’hui, contraste social et urbanistique entre les quartiers traversés, pas de jugement de ma part, pas de voyeurisme, pas d’élitisme, la balade continue dans la ville qui change, qui évolue, qui mue par endroits. Je suis passé à Borderouge, aux Izards, aux Trois-Cocus, à la Vache, aux Minimes, aux Chalets au centre historique et dans l’hyper-centre (Croix-Baragnon, Ozenne), à Empalot, au Busca ou à Sauzelong, sacré contraste …
Borderouge, la Vache sont des quartiers récents qui se sont développés avec la ligne B du métro. J’y ai connu les derniers maraîchers avec leurs toulousaines typiques toutes en longueur, il en reste quelques-unes vers Lalande ou Launaguet … Borderouge tient d’ailleurs son nom d’une de ces fermes maraîchères.
Borderouge est traversé de nombreux piétionniers très agréables.
L’origine des Trois Cocus vient du patois « cocut » qui signifie « coucou », pas d’histoire d’adultère …
Les trois coucous étaient sculptés sur une bâtisse aujourd’hui disparue et auraient donné le nom de ce secteur de Toulouse. Ce sont les soldats napoléoniens qui, ne maîtrisant pas l’occitan, auraient mal compris ce que leur disaient les habitants en nommant « Tres Cocuts » leur quartier, cela a donc été traduit et diffusé comme « Trois Cocus ».
Dans les années 20 ce quartier a abrité des cités-jardins. Ces cités étaient destinées aux habitants à faible revenu, elles sont l’ancêtre des H.L.M. Elles devaient intégrer des espaces verts, des infrastructures publiques. Jean Montauriol, architecte en chef de la ville de Toulouse entre 1929 et 1949, a créé ces cités et beaucoup de monuments caractéristiques de cette époque, comme la Bibliothèque d’étude et du patrimoine Rue du Périgord ou le groupe scolaire Ernest Renan au sein du quartier des Trois-Cocus.
Plus récemment, une certaine délinquance et le trafic de stupéfiants s’y est développé, certains extrémismes aussi … Mais les médias s’emparent plus de ce genre d’information sans chercher à s’intéresser à ce qu’on peut trouver de positif dans ces quartiers …
Le quartier est bordé par le joli Parc de la Maourine qui abrite les Serres municipales.
Une vie culturelle et associative s’y est bien développée.
Pour le quartier de La Vache, l’origine est incertaine …
Les Minimes, chers à Claude Nougaro, tiennent leur nom à l’installation au XVème siècle de religieux de l’ordre des Minimes. Le nom de la Rue du Caillou Gris qui part de la Place du Marché aux Cochons et qui se situait à la limite des terres des Minimes vient de l’habitude qu’avaient les moines de jeter là les pierres qui les gênaient dans leurs terres.
Pour La Salade, le nom ne vient pas des nombreux maraîchers qui habitaient là. La « salada » désigne en occitan une fourche patibulaire, gibet de torture, il n’est pas certain que ce soit cette salade-là qui ait donné son nom au quartier éponyme.
Je suis repassé dans le quartier des Chalets dont le nom viendrait des chalets et maisons de bois loués par les militaires et artilleurs de la caserne Compans, afin d’abriter leurs amours clandestines. À la fin de la Belle-Époque, on y bâtît de belles demeures, en belle pierre. La plus belle est sans aucun doute le château des Verrières, propriété du peintre-verrier et manufacturier Louis-Victor Gesta, vestige d’une des plus importantes manufactures de vitraux du XIXème siècle. Ce château mérite sans aucun le détour, il est peu connu des Toulousains et des touristes.
Le quartier Négreneys pourrait tenir son nom de l’occitan « nausa negra » puis « negra naura », mare noire boueuse, il devait y en avoir dans cette zone de lande plate où les eaux stagnaient …
Je suis aussi repassé à Saint-Éloi, pas de chanson parlant du bon Roi Dagobert, mais un des sites industriels historiques de l’histoire de l’aéronautique toulousaine et française. Elle a vu le jour dans les années 20 sous la houlette d’Émile Dewoitine, a poursuivi son essor avec plus tard Sud-Aviation, Aérospatiale ou Airbus. Une partie de ma famille (grand-père, oncles, tante, père) y ont travaillé, sur les différents sites.
Toulouse, certainement comme les grandes métropoles, est toujours en travaux. Actuellement, ce sont ceux de la nouvelle ligne de métro qui occupent l’espace. Il a même fallu déplacer l’Arc de Triomphe aux dimensions imposantes (17 m de long, 12 de large et 16 de haut pour 1 300 tonnes environ) d’une trentaine de mètres pour les besoins des travaux de la station François-Verdier. Ce monument toulousain emblématique bâti après la Première guerre retrouvera sa place une fois les travaux terminés.
Le quartier Sauzelong, très populaire, est connu pour sa « boule », le microscope électronique (inauguré par le Général de Gaulle en 1959) du C.E.M.E.S, Centre d’Élaboration de Matériaux et d’Études Structurales, ce microscope n’est plus opérationnel aujourd’hui, la boule a été conservée.
L’étymologie du quartier vient sans doute de sauze ou sause en occitan, signifiant saule, cet arbre dans sa variété saule tardif ou allongé ne manquait pas autrefois dans ce coin marécageux.
Mis à part les hôtels particuliers de l’hypercentre dont la plupart ont été divisés en appartements, les quartiers du Busca et de Monplaisir sont parmi les plus cossus de Toulouse.
Ils sont voisins du Jardin des Plantes et du Grand-Rond et du Canal du Midi et du Port Saint-Sauveur.
Ces deux quartiers ont été marqués par l’histoire contemporaine : la Gestapo y avait son siège, le Musée de la Résistance et de la Déportation ainsi que le Mémorial de la Shoah y ont été installés.
J’ai débuté la balade dans le brouillard, il s’est levé en début d’après-midi, la brique a pris au soleil maintes couleurs, du rouge au marron ou à l’orangé … La brique n’a pas toujours été apparente sur les bâtiments toulousains. Un arrêté des Capitouls, au XVIIIème siècle, imposa même aux toulousains de blanchir leurs façades, pour des raisons de salubrité. C’est après la Seconde guerre que les briques vont réapparaître sur les façades toulousaines, sous l’impulsion des municipalités successives.
La ville rose tiendrait cette dénomination non de la brique mais des poètes de l’Académie des Jeux Floraux. L’historienne Luce Barangue explique : « Chez les poètes toulousains, un air du temps poétique lia le rose avec l’idée de séduction, jeunesse, sensualité, fragilité, la rime facile Tolose / rose fit sans doute le reste. »
Les poètes associaient la ville à une femme, à la sensualité, le jeunesse … Caractères relatifs à la rose …
Ce n’est que bien plus tard que le lien fut fait avec la brique.
En parlant de brique, il faut citer l’Hôtel de pierre, Hôtel de Bagis, 25 Rue de la Dalbade, fait de pierres et non de brique, ce qui était unique au XVIIème à Toulouse.
Comme toute métropole, Toulouse a ses coins bien moins roses, à travers ces pérégrinations citadines je peux en traverser certains, crasseux, pollués, pas forcément où la bien-pensance aimerait les situer …
Encore environ 200 km pour clore mon « Tout Toulouse ou presque » … Le genre de balade à faire un dimanche ou pendant des vacances, compliqué de tenir un certain rythme avec tous ces changements de direction, croisements, circulation piétonne dans le centre et l’hyper-centre …